Admirateur de Faure Gnassingbé, ce jeune militant de l’Union pour la République (UNIR), le parti au pouvoir, Abdel Kader Bouraïma (Photo) fut l’un de ces activistes qui au début de la crise sociopolitique du 19 août 2017 à appeler les togolais à l’apaisement et de privilégier le dialogue pour une sortie de crise. Alors que le dialogue tant attendu entre l’opposition et le pouvoir s’ouvre dans quelques heures, il nous accorde une interview dans laquelle, il souhaite que le dialogue soit inclusif et que les participants puissent faire prévaloir l’intérêt du peuple, seul gage de sa réussite. Lisez plutôt !
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Gapola : Pensez-vous que toutes les conditions sont réunies aujourd’hui pour que le dialogue qui s’ouvre dans quelques heures puisse nous conduire à une sortie de crise?
Abdel Kader : D’entrée de jeu, permettez-moi de vous remercier pour l’honneur et l’opportunité que vous me faites en me donnant en tant que simple citoyen et patriote, l’occasion de m’exprimer sur la situation que connait notre cher pays le Togo depuis bientôt six mois. Pour revenir à votre question, je dirai que les conditions sont à mon avis réunies pour que le dialogue qui s’ouvre, soit une solution à la décrispation de la tension sociopolitique que connait notre pays, le Togo. Et ceci dépendra surtout de la bonne foi et de la bonne volonté des participants à cette rencontre qui doit selon moi, poser les bases d’un nouveau départ pour notre pays. C’est en cela que je pense humblement que ce dialogue devrait et doit être inclusif afin d’éviter de faire des mécontents qui, du jour au lendemain pourront aussi descendre dans la rue pour réclamer les mêmes choses que ceux qui sont aujourd’hui dans la rue.
Également, les participants à ce dialogue doivent surtout mettre l’intérêt de la nation au-devant de tout autre intérêt et considération en évitant de mettre sur la table des discussions des choses qui pourront faire échouer le dialogue. Ils doivent faire privilégier au cours des discussions les vraies aspirations des togolais pour un renouveau.
Dans ce cas quel doit être l’état d’esprit des participants à ces pourparlers pour la réussite du dialogue?
Comme je le disais, chacun des participants à ce dialogue, doit être animé d’une bonne foi et d’une bonne volonté à faire aboutir ce dialogue. Et pour cela, il faut privilégier l’intérêt général de l’ensemble des togolais aux intérêts personnels. Se référer aux échecs passés et éviter que les même causes ne produisent les mêmes effets car comme disait un savant : « si le passé n’éclaire pas le présent, l’esprit marche dans les ténèbres ». Tout le monde connait les vraies préoccupations des togolais à savoir : la limitation des mandats présidentiels à deux, deux tours de scrutin et la réforme du cadre électoral… sans perdre de vue les réformes socioéconomiques, le problème de chômage, la vie chère… qui sont aussi des aspirations profondes et des attentes de nombres de togolais qui sont aujourd’hui dans la rue. S’éloigner de ces questions, serait sans nul doute faire échouer le dialogue.
L’armée comme le souhaite l’ancien premier ministre, Agbéyomé Kodjo, doit-elle prendre part aux assises ? Si oui à quel titre?
Parlant de la participation ou non de l’armée à ce dialogue, il revient aux acteurs de savoir s’ils ont ou non besoin d’associer l’armée en tant qu’entité de la République aux discussions. Maintenant, par principe l’exclusivité du dialogue que je soutiens voudrait que tous les citoyens puissent être associés aux débats qui engagent leur avenir, malheureusement, nous ne sommes pas dans la Grèce Antique où les populations étaient convoquées dans des agoras pour que chacun se prononce sur les problèmes de la cité. Agbéyomé Kodjo, a fait une proposition en fonction de son expérience et il faut laisser le soin aux différents protagonistes de la crise de juger de l’opportunité ou non d’associer l’armée à ce dialogue. Ce qui est important et fondamental à mes yeux, c’est qu’on donne la chance à tous ceux qui peuvent d’une manière ou d’une autre contribuer à la résolution durable et définitive de la crise, d’y participer.
Certains de la société civile pensent que le Togo pourrait sortir de son marasme avec un gouvernement de transition. Qu’en pensez-vous ?
Je ne pense pas que dans l’état actuel des choses, la solution à la crise togolaise passerait par un gouvernement de transition. Si un gouvernement de transition était la panacée, je crois que depuis vingt-sept ans que le Togo a fait l’expérience d’un gouvernement de transition, tous les problèmes du Togo seraient déjà résolus. Je parlerai plutôt d’un gouvernement de large union nationale comme ce qui s’est fait en 2006 au sortir de l’APG et qui a échoué tout simplement parce que certains ont privilégié leurs intérêts personnels au détriment de ceux des populations. Ce qui a conduit à l’état actuel des choses. Si tout le monde avait mis du sien en 2006 en allant à ce gouvernement d’union nationale dirigé par Me Yaovi Agboyibo, sûrement qu’on en serait pas là aujourd’hui.
Depuis l’arrivée de Faure Gnassingbé au pouvoir, pourquoi chaque jour que Dieu fait, l’on assiste à la grogne sociale dans le pays ?
Toutes ces grognes font partie de la vitalité démocratique de tout pays. Ce n’est pas singulier au Togo. Elles concourent à obliger les gouvernants à faire davantage mieux que ce qui est déjà entrain d’être fait. Autrement, les dirigeants dormiraient sur leurs lauriers pensant avoir tout fait. Gouverner, c’est faire face à chaque instant à des problèmes notamment à des revendications de la population. Mais dites-moi, connaissez-vous un pays au monde où tout est rose sans grognes sociales ? Même la France et les États-Unis que nous aimons citer en exemple, il y a des grognes sociales. Tout à côté de nous au Bénin, pays que nous citons aussi en exemple de démocratie en Afrique, voyez-vous les efforts que font Patrice Talon, mais il y a aussi des grognes sociales. C’est dire, que rien n’est jamais parfait et tout est perfectible et c’est le cas aussi au Togo où le gouvernement continue de faire des efforts qu’il faut saluer.
Quand vous comparez le salaire des enseignants togolais, des médecins, … avant l’arrivée de S.E Faure Gnassingbé au pouvoir et depuis son arrivée, vous comprendrez qu’il y a une grande amélioration et cela peut être encore mieux, et pour cela il faut lui donner du temps. L’essentiel aujourd’hui, c’est que le gouvernement sous l’impulsion du Président de la République, est entrain d’apporter des réponses à tous ces problèmes à travers des cadres de discussions et de concertations avec les différents acteurs. Les différentes Centrales syndicales sont en discussion permanentes avec le gouvernement pour trouver ensemble les solutions idoines en fonctions des moyens et des ressources disponibles. Seulement, j’invite les acteurs syndicaux à éviter une certaine récupération politique de leurs légitimes revendication et qu’ils ne perdent pas de vue que le Togo revient de très loin après 15 années de suspension de la coopération internationale. Paris n’étant pas construite en un seul jour, tout est en constante amélioration.
Dans l’un de vos derniers posting sur les réseaux sociaux, vous avez fait une proposition au chef de l’Etat. Pouvez-vous revenir là-dessus s’il vous plait ?
(Sourire….), en fait, j’ai simplement et humblement voulu à travers cette proposition faite au chef de l’État, apporter ma modeste contribution à la construction de notre édifice nationale, notre patrimoine commun, le Togo. En effet, j’ai simplement proposé au chef de l’État, Faure Gnassingbé de penser à organiser d’une manière cumulée les prochaines joutes électorale à savoir : le référendum, les locales et les législatives. Ma proposition est fondée sur le fait de pouvoir minimiser les coûts de l’organisation de ces élections. Vous n’êtes sans savoir combien coûte l’organisation d’une seule élection et organiser en une seule année trois élections d’une manière séparée reviendrait trop lourde pour notre pays dont l’économie a été paralysée et fragilisée par les mouvements politiques nés du 19 Août dernier. D’ailleurs la même chose se fait dans plusieurs pays en Afrique et je pense que le Togo pourrait faire aussi cette expérience qui permettrait au pays d’économiser afin de répondre à certaines revendications sociales.
Nous avons aussi proposé que le peuple puisse à travers le référendum se prononcer sur les réformes engagées par le gouvernement conforment aux dispositions constitutionnelles. Car nous estimons que la souveraineté appartient au peuple et qu’il a le droit de se prononcer sur les réformes qui lui engagent surtout que les représentants du peuple ne se sont pas entendus à l’Assemblée Nationale.
On connait votre admiration pour Faure Gnassingbé, quel conseil pourriez-vous lui donner pour qu’après le dialogue le Togo renaisse de ses cendres ?
C’est vrai et je le clame haut et fort, j’ai beaucoup d’admiration pour le chef de l’État, Faure Gnassingbé surtout pour son sens d’ouverture, de dialogue et de discussions ainsi que son sens de vision qui consiste à mettre le Togo sur le chemin de l’émergence. Mais de là, à m’ériger en conseiller du chef de l’État, c’est me donner trop de considération. Je pense que le président de la République a des conseillers, qui s’occupent de ce volet et ils le font déjà très bien. Si je peux dire quelque chose en tant que simple citoyen, c’est de convier toutes les parties prenantes à ces discussions à respecter les termes de l’accord issu de ces pourparlers dans le strict intérêt général de la nation togolaise.
Interview réalisée par Thierry AFFANOUKOE